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société moderne est furieusement réactionnaire.

Elle étonne les esprits droits et ceux qui ont la candeur de croire au progrès. C’est ainsi que M. Gabriel Monod écrivait au mois de juillet 1902 : « Ceux qui, comme moi, sont partisans d’une liberté absolue d’association et en même temps de la séparation de l’Eglise de l’Etat… sont effrayés et navrés de voir les anticléricaux d’aujourd’hui manifester à l’égard de l’Eglise catholique des sentiments et des doctrines identiques à ceux que les catholiques manifestaient naguère à l’égard des protestants et des hérétiques de tout ordre. On lit aujourd’hui dans certains journaux qu’il n’est pas possible de laisser l’Eglise catholique continuer à élever la jeunesse française dans l’erreur ; j’ai même lu « qu’il n’était pas possible d’admettre la liberté de l’erreur ». Comme si la liberté de l’erreur n’était pas l’essence même de la liberté ! Et dire que ceux qui écrivent ces phrases protestent contre le Syllabus, tout en le copiant [littéralement]. Sommes-nous condamnés à être perpétuellement ballottés entre deux intolérances, et le cri de « Vive la liberté » ne sera-t-il jamais que le cri des oppositions persécutées, au lieu d’être la devise des majorités triomphantes ? »

— Il n’en faut aucunement douter, cher Monsieur, et je ne vois pas un gouvernement crier « Vive la liberté ! » ce qui ne peut avoir pour lui que le sens de : « Vive l’opposition ! » — à moins,