Page:Faguet - Le Libéralisme.djvu/120

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pas douteux ; la réalité légale n’en peut être ni perçue, ni définie, ni surtout mesurée. Celui qui a dit (c’est, je crois, de Bonald) : « Je déteste les mauvaises doctrines plus que les mauvaises actions », a parfaitement raison ; mais punir les mauvaises doctrines autant que les mauvaises actions, même quand les mauvaises actions ont suivi les mauvaises doctrines, il me semble que c’est impossible. Pourquoi ? Parce qu’il y a loin de la coupe aux lèvres.

L’homme même qui projette le crime et qui dit qu’il le commettra, très souvent ne le commet pas. A plus forte raison ne faut-il pas établir de connexion entre un crime provoqué par les uns et commis par les autres.

Il restera toujours ceci que la conscience est blessée de ce que ceux qui sont moralement les plus coupables, à savoir ceux qui provoquent, soient indemnes, et de ce que ceux qui sont moralement les moins coupables, à savoir ceux qui sont poussés, soient punis. Mais ce qu’il ne faut oublier jamais, c’est que la société qui prétend punir les fautes morales, les péchés, n’a plus aucune limite à ses actes arbitraires. Elle peut tout punir, actes, paroles parlées, paroles écrites, gestes, attitudes, pensées. Elle constitue un abominable gouvernement ecclésiastique et théocratique. Elle s’achemine vers le gouvernement des jésuites en Paraguay.

La parole la plus follement réactionnaire qui ait