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LES CONTES DE NOS PÈRES.

alors ce que le lecteur a deviné depuis longtemps, savoir que le baril était plein de poudre.

À ce moment, comme si tout se fût réuni pour l’accabler, les coups recommencèrent, plus rapprochés et plus vigoureux.

La pauvre femme poussa un cri déchirant : et, prenant son enfant dans ses bras, elle se réfugia à l’angle le plus éloigné de la cachette.

— Je m’étais trompé, murmura le vieillard avec une tristesse mêlée d’orgueil ; — je vois que ce n’est pas chose si banale que d’envisager la mort sans frémir, et que je n’ai pas vécu assez encore pour voir le cœur d’une femme s’égaler au courage du vieux soldat.

Il détourna froidement ses regards d’Henriette, pour épier le premier indice de l’invasion des républicains.

— Armand ! Armand ! au secours ! cria Mme de Thélouars dont la tête se perdait.




Le cheval de Janet Legoff était vite, et Dieu sait qu’il l’éperonna comme il faut. Il avait déplié le billet, et il savait lire. Plus de doute maintenant. Sa jeune maîtresse était là, en péril de mort.

— Armand ! au secours ! disait la pauvre femme, sur le papier comme de vive voix.

Janet allait comme le vent.

Son cheval épuisé tomba mourant à trois cents pas du manoir de K… Janet prit sa course, sans donner un regard à son fidèle compagnon, et atteignit la porte en quelques secondes.