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LES CONTES DE NOS PÈRES.

Voici ce qui était arrivé :

Les gentilshommes de Rennes à qui s’adressa le comte Addel se trouvèrent avoir plus de vaillance que d’écus d’or. Ils ceignirent leurs longues épées, prirent leurs lances, et montèrent à cheval. Addel, dont le courroux grandissait par les obstacles, les guida lui-même vers le château de Lucifer. Au pied de la colline, les gentilshommes de Rennes rencontrèrent une troupe nombreuse de cavaliers commandés par Hervé de Lohéac, Martin Mortemer de Mauron et Yves Malgagnes. Les trois barons avaient employé comme il faut leurs dix mille écus d’or.

On fit le siège du château de Lucifer, et c’était le bruit du combat que Rachel entendait naguère sous les taillis du Val. Les hommes d’armes de l’usurpateur furent facilement vaincus, d’autant que ce dernier s’était caché on ne savait où dès le commencement de la bataille. On prit le château, on y mit le feu par excès de zèle ou autrement, sans réfléchir que ce n’était point rendre un service très-précieux au comte Addel, et l’on chercha Lucifer depuis le rez-de-chaussée jusqu’aux combles.

Point de Lucifer.

Rachel, cependant, continuait de monter. Elle ne voyait plus ; elle ne pensait plus. Un ardent et vague désir de sauver Addel et son père la poussait en avant.

Au moment où elle arrivait au pied des murailles, une cavalcade franchit la grande porte, abandonnant le château à demi consumé. Addel marchait en tête.

— Monseigneur ! cria Rachel, en tombant, brisée, sur l’herbe, je vous apporte l’or des fées.

Or, il se trouva que MM. de Lohéac, de Mauron et Malgagnes, tout en distribuant çà et là de surprenants coups d’es-