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car la famille qui l’avait repoussée, représentait pour elle la société tout entière.

Elle se vengeait.

La fortune qu’elle poursuivait depuis vingt ans, à travers le danger bravement affronté, à travers le crime exécuté froidement, c’était encore la vengeance.

Et pourtant, car Dieu ne veut pas qu’il y ait au monde une créature humaine dépourvue de tout sentiment humain, la belle Laure avait un cœur, et dans ce cœur quelque chose vibrait, aimait et souffrait.

Cette mère qui avait abandonné un jour son enfant sans regret ni souci, on peut le dire, vivait désormais par le souvenir de son enfant.

Cela lui était venu, je ne sais comme, un jour que la marquise Domenica lui avait présenté Mlle d’Aleix en disant : « Si je ne retrouve pas mon fils, voilà celle qui possédera nos immenses richesses ! »

Un choc s’était produit au dedans de Laure. Quelque chose l’attirait vers cette belle enfant, mais elle pensait : « Ma fille doit être belle aussi, et c’est ma fille qui devrait être héritière à sa place. »

Dans le cours de ce récit nous n’avons montré qu’une seule fois Laure cherchant sa fille et encore le lecteur a-t-il pu voir en ce fait isolé un expédient.

Mais, en réalité, ses démarches avaient été actives et obstinées. Elle voulait sa fille non seulement pour l’adorer mais encore pour la mettre à la place de Charlotte condamnée.

Aujourd’hui même, avant le drame de Ville-d’Avray, un de ses agents, qui n’était autre que le père Preux,