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— Où est-il, celui-là ? Au nom de Dieu ! répondez-moi !

— Dominons d’abord notre émotion, dit Pernola feignant de faire un grand effort sur lui-même pour recouvrer son calme. Soyons froids comme il convient de l’être à l’heure des grandes déterminations. Je ne peux pas vous détailler tous les rouages de cette conspiration dans laquelle ma noble cousine n’est certes pas complice ; mais qu’importe cela, si elle y est dupe ? Ignorez-vous l’ardent désir qu’elle a de retrouver l’enfant ? les sommes énormes qu’elle a dépensées ? les efforts extravagants qu’elle a tentés ? Faut-il vous rappeler la bonté facile de son cœur, la simplicité charmante, mais dangereuse, la faiblesse enfin de son esprit ? Je suis à cent lieues de blâmer sa conduite ; elle est pour moi respectable et touchante jusque dans son erreur : l’espoir ne peut pas mourir dans le cœur des mères, c’est la Providence qui veut cela…

Un geste de M. de Sampierre l’interrompit.

— Madame la marquise n’a pas besoin d’être défendue, dit-il avec cette belle dignité qui lui venait par bouffées. Je vous ai demandé où est celui que vous nommez « l’imposteur. » Veuillez répondre, j’attends.

— Ils sont plusieurs, répliqua le comte amèrement ; vous pourrez choisir, si l’envie vous prend d’être trompé vous-même.

Et comme le marquis l’interrogeait du regard, il reprit d’un ton de profonde tristesse :

— Il y a des instants où je me demande par quel miracle mon courage survit à tant de dégoûts ! Je suis seul