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Nous n’avons nulle envie de jouer à cache-cache avec le lecteur. Dans le fait de cette belle Laure, il ne s’agissait pas de sorcellerie, mais bien de mémoire puisque c’était elle qui avait glissé la missive miraculeuse dans le coffret par les mains de Donat, dit Mylord, ce jeune serrurier de si grande espérance qui attendait présentement son tour d’audience à quelques pas de là, dans le boudoir.

Pour Mylord, un pareil tour d’adresse était la chose la plus simple du monde.

— Écoutez, reprit Laure, voici ce que j’ai lu : « À Domenica de Sampierre, princesse Paléologue.

« La main qui tenait les Trois Glaives est desséchée. Le dernier des chevaliers repose dans la terre lointaine, au-delà de l’Océan, mais celui qui vous donna sa vie entière sans rien prétendre en retour n’est pas mort avant d’avoir accompli sa tâche… »

— C’est inimaginable ! murmura la marquise qui avait déplié la lettre et lisait le texte à mesure. J’ai vu bien des somnambules, j’ai consulté bien des professeurs, jamais je n’ai rien rencontré de pareil. Et quel bon cœur que ce vicomte, hein ? Ma petite, vous êtes très-forte. Allez !

— « Le jeune prince, continua Laure, lisant toujours, celui qui réunit dans ses veines le sang des empereurs au sang des apôtres, avait quinze ans, lorsque son noble protecteur succomba… »

Domenica porta son mouchoir à ses yeux.

— Pauvre cher vicomte ! dit-elle ; je lui suis bien reconnaissante. Ah ! il avait beaucoup d’affection pour