Page:Féval - Les Cinq - 1875, volume 1.pdf/394

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Je vous commande expressément de me dire où j’étais il y a une heure.

Laure, qui regardait fixement le vide, fut quelque temps avant de répondre.

Domenica, superbe d’importance, lui envoya une passe de secours en ajoutant :

— Allez, chérie !

— Vous étiez à l’église, dit enfin la jolie baronne.

— Pas mal !… Quelle église ? »

— Aux Missions étrangères.

— Très bien ! Mais c’est ma paroisse et j’y vais tous les jours, cela n’était pas malin à trouver. Voici le difficile qui commence : Ayez la bonté de me dire ce qui m’est arrivé à l’église.

Elle ajouta en dessinant une passe bien calibrée :

— Je le veux, ma chère, allez !

On entrevoyait comme un travail sur le visage immobile de Laure. Ses prunelles ternes, pour employer une expression du métier, « regardaient en dedans. »

— Je suis lucide ! dit-elle très-bas. Je vois le monde dans l’église… Je vous vois… vous êtes agenouillée et vous pleurez… que faites-vous au dossier de votre chaise ? Ah ! il y a un petit coffre sous l’accoudoir ; vous l’ouvrez, vous y choisissez un livre… un livre usé : vous vous en servez depuis longtemps…

Elle s’arrêta. Domenica l’écoutait la bouche ouverte.

— Et bien ! fit-elle.

— Il y a quelque chose dans le livre, poursuivit Laure péniblement. Je ne vois pas ce que c’est… atten-