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CHAPITRE XIX.

L’orage était passé. Nos trois fugitifs, accompagnés du vieux Géraud, descendirent vers le passage du Port-Corbeau.

La parole lugubre de Benoît Haligan pesait sur leurs poitrines oppressées.

Tandis que Géraud détachait le bac, Marthe était restée un peu en arrière.

Le vent avait chassé les nuages. La lune brillait à travers les branches mouillées. Marthe se retourna pour jeter un dernier regard sur le manoir.

Dans le sentier, éclairé à demi, elle vit deux formes connues qui se glissaient en se tenant par la main, deux jeunes filles dont la longue chevelure flottait au dernier souffle de l’orage…

Marthe joignit les mains en poussant un cri faible. Elle était tombée sur ses genoux.

L’oncle Jean s’élança vers elle.

— Je les ai vues !… répondit Marthe à ses questions ; toutes deux !… La mort ne les a point changées… Elles m’ont jeté un baiser avec un sourire… Oh ! je les reverrai bien souvent, car elles savent à présent comme je les aimais !

...............

Malgré son apparence de solitude et d’abandon, le manoir avait bien gardé quelques hôtes. À peine René, Marthe et l’oncle Jean eurent-ils quitté le grand salon, qu’une porte