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LES BELLES-DE-NUIT.

Marthe avait la tête penchée et des larmes coulaient sur ses mains jointes.

René la regardait avec un sourire cruel.

— Voici une longue lettre…, dit-il, et nous en avons ici de plus longues. (Il frappait sur le portefeuille.) Je vous l’ai lue tout entière, parce qu’on procède ainsi quand on est juge, madame… mais je sais parfaitement que vous la connaissez mieux que moi.

Parmi la douleur de Marthe, il y avait comme une joie recueillie ; chacune des paroles d’amour contenues dans la lettre était descendue jusqu’au fond de son cœur.

Aux derniers mots de son mari, elle releva la tête et l’interrogea du regard.

— Je ne vous comprends pas…, murmura-t-elle.

René toucha du doigt le papier encore déplié.

— Il y a bien des larmes sur cette lettre !… dit-il. Je ne sais plus celles qui sont à mon généreux frère et celles qui sont à vous.

— Monsieur, répliqua Marthe, vous ne m’aviez jamais dit que Louis de Penhoël vous eût écrit depuis son départ.

— Vous l’aviez apparemment deviné ?…

— C’est la première fois que j’entends parler de cette lettre, monsieur.

L’accent de Marthe était si simple et si vrai,