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LES BELLES-DE-NUIT.

Son regard s’élevait alors furtivement sur Étienne. Ce regard ému exprimait-il de la compassion encore ou déjà de l’envie ?

Étienne laissait dire son cœur. Tout ce qu’il avait ressenti durant ces deux belles années, il se le rappelait tout haut avec délices. Aucun détail, si petit qu’il fût, ne se perdait dans sa mémoire emplie. On reconnaissait les mots charmants et timides qui tombent d’une bouche de vierge ; on devinait l’aveu muet que laisse échapper le sourire ; on sentait trembler la petite main blanche sous le baiser dérobé…

C’était gracieux comme le premier amour lui-même.

Et le jeune peintre, qui s’était fait prier d’abord, ne tarissait plus maintenant. Il cherchait, au contraire, à prolonger la confidence ; il caressait, comme en se jouant, la poésie chaste des détails de son histoire.

Montalt ne l’interrompit point ; mais que de fois son visage mobile avait changé pendant le récit !

Tantôt il écoutait pour Étienne, et alors ses beaux traits gardaient ce sourire tout plein de tendresse et de paternelle protection. D’autres fois, la ligne fière de ses sourcils se brisait tout à coup ; une pensée d’amertume venait assombrir sa figure pâlie. C’est qu’alors il écoutait pour