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CHAPITRE II.

hôtel décharné, gris, maussade, coiffé de girouettes monstrueuses et ceint de longues balustrades de fer ; au-dessus, de grands rochers, des églises roides et tristes, des arbres vieux comme la ville elle-même, qui est la doyenne des cités de Bretagne ; et au-dessus encore le château, ce débris informe dont le temps a fait une merveille.

N’y a-t-il point là le caprice d’un génie artiste ? et n’est-ce que le résultat du patient travail des années ? La main de l’homme a-t-elle aidé à cette confusion puissante qui, mêlant le riant et le terrible, va couronner ce sombre géant de pierre d’une chevelure odorante et fleurie.

On ne sait où commence, on ne sait où finit la lourde enceinte, flanquée de tours rondes et ventrues. Elle se perd parmi les maisons ; elle disparaît derrière les arbres ; on la voit montrer au détour d’une rue sa maçonnerie cyclopéenne, dont la base plonge au fond des vertes douves transformées en jardins. Ce furent des bras de Titans qui portèrent au haut de la montagne ces énormes blocs de granit. Et quel contraste ! Sur cette ruine usée, noircie, caduque, des fleurs partout ! Chaque crevasse présente son brillant bouquet ; chaque meurtrière laisse échapper sa joyeuse guirlande. Au bas des murailles, où commence l’épais manteau de lierre