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LES BELLES-DE-NUIT.

Cette famille encombre à elle seule une cour de messageries, tant elle a d’amis qui viennent pleurer sur son départ et lui souhaiter bon voyage. Elle se charge des commissions de toute une ville ; quand elle part, la malle-poste n’a plus rien dans ses coffres.

Il y avait, pour la rotonde, le petit jeune homme qui va faire son droit à Paris, emportant avec lui le cher manuscrit de cette tragédie que le Théâtre-Français, hélas ! ne voudra point jouer ; la petite fille, sournoise et pauvre, que vous rencontrerez peut-être, au bout d’un mois, pimpante et bien changée dans une loge de l’Opéra ; enfin, la nourrice discrète, vaste, rouge, qui va voir si Paris lui garde un rejeton royal à allaiter.

Pour l’impériale, deux hommes à moustaches et à pipes.

Restait ce compartiment aristocratique : le coupé, que l’on nommait à Rennes, en ce temps, le cabriolet.

Dans la foule bavarde et attendrie qui entourait la voiture, on se disait qu’un monsieur, venant de Brest, avait pris le cabriolet pour lui tout seul. On ajoutait, entre deux poignées de mains arrosées de larmes, que ce monsieur était un Anglais, et que les Anglais sont des originaux qui ne font rien comme tout le monde.