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rence de leurs impressions présentes, le dévouement égal et profond qui était au fond de leur âme se lisait à travers la rancune enfantine de Cyprienne comme sur la belle patience de Diane.

Cyprienne n’avait point parlé encore ; Diane, qui devinait sur sa lèvre mutine un mot de reproche prêt à s’élancer, l’arrêta du geste et reprit :

— Si nous nous trompons, madame, et Dieu le veuille, je vous en prie, ne soyez pas fâchée contre nous !…

Tandis qu’elles avaient les yeux baissés, Marthe de Penhoël se pencha au-dessus d’elles et les baisa toutes deux. Elles tressaillirent ; Cyprienne ne put retenir un petit cri de joie.

— Pauvres enfants !… dit Marthe, je ne suis pas fâchée contre vous… mais, croyez-moi, jouissez en paix des plaisirs de votre âge… Parfois, les années insouciantes et bonnes sont bien courtes pour nous autres femmes !… Qui sait si demain vous ne commencerez pas à penser et à souffrir ?… Jusque-là, pauvres enfants, n’essayez pas de deviner une peine que vous ne pourriez point soulager… L’heure viendra pour vous comme pour toutes, mes filles, ajouta-t-elle plus tristement ; pourquoi la devancer ?… Avez-vous donc tant de hâte de souffrir ?…

— Nous vous aimons, madame…, répondit Diane.