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Le temps était lourd et accablant comme la veille ; seulement une brise tiède soufflait par rafales et déchirait çà et là le voile de nuages qui couvrait le ciel. La lune se montrait par intervalles, faisant sortir des ténèbres les marais et les montagnes. Cela durait une minute, et tout disparaissait, envahi de nouveau par la nuit victorieuse.

Le long de la route solitaire, Marthe de Penhoël chancela plus d’une fois, car elle était bien faible. Plus d’une fois elle s’arrêta saisie d’une sorte d’épouvante, parce qu’un rayon de lune glissant tout à coup à travers les arbres lui montrait, couchées sur l’herbe, deux enfants immobiles et endormies dans leurs robes blanches…

D’autres fois, quand son regard se tournait vers le marais qui s’étendait sur sa gauche à perte de vue, il lui semblait qu’une voix triste murmurait à son oreille les mélancoliques paroles du chant breton.

C’était l’heure où les vierges mortes viennent pleurer la vie sous les saules. Marthe apercevait comme des ombres vagues qui se mouvaient au bord de l’eau. Pauvres belles-de-nuit !… Marthe était une fille de la Bretagne. Ses yeux se mouillaient de larmes, et ses bras s’étendaient vers les saules.

Elle poursuivait sa route. Autour de son in-