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manoir, une petite société, composée d’un jeune garçon et de deux jeunes filles, chuchotait et riait tout bas.

Le garçon, qui se nommait Roger de Launoy, était de l’âge de Vincent à peu près : un joli cavalier au visage étourdi, à la tournure leste et dégagée, un vrai page, pris à la veille du jour fatal où l’amour rend les pages langoureux.

Ses deux compagnes, qui pouvaient avoir quatorze ou quinze ans, étaient bien les deux créatures les plus mignonnes que l’imagination d’un peintre puisse rêver.

Elles étaient habillées toutes deux en paysannes, suivant la volonté de l’oncle Jean, leur père ; mais il y avait dans leurs costumes une si délicieuse coquetterie, que plus d’une belle dame eût porté envie à leur toilette. Leurs longs cheveux d’une nuance pareille, tenant le milieu entre le châtain sombre et le brun, s’échappaient en boucles abondantes des bords étroitement serrés de leurs bonnets collants. À chaque mouvement qu’elles faisaient, on voyait ces riches chevelures ondoyer et se jouer autour de leur cou blanc, où tranchait une petite ganse noire, supportant une croix d’or. Leurs tailles, souples et fines, étaient emprisonnées dans des corsages de laine brune, autour desquels s’atta-