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frère… Ah ! il y a là dedans bien des choses que je ne comprends pas !

Il s’arrêta et passa la main sur son front, en homme qui recueille involontairement ses souvenirs.

— Jamais on ne vit deux enfants s’aimer comme cela ! reprit-il (et l’Américain, cette fois, n’eut garde de l’interrompre). Depuis le jour de leur naissance jusqu’à l’âge de vingt ans, on ne les avait jamais vus l’un sans l’autre. On eût dit qu’ils n’avaient à deux qu’un seul cœur. Et puis tout à coup, du vivant même du vieux monsieur et de la vieille dame, qui sont maintenant un saint et une sainte dedans le ciel, un mystérieux vent de malheur passa sur le manoir… Il y avait une jeune fille belle comme les anges…

L’aubergiste s’interrompit encore et poussa un gros soupir.

L’Américain était tout oreilles.

— On ne sait pas ce qui eut lieu, poursuivit le père Géraud. Vers ce temps, les Pontalès revinrent au manoir. Et quand Pontalès serre la main de Penhoël, le diable rit au fond de l’enfer !

Une question se pressa sur la lèvre de Robert, qui fit effort pour garder le silence.

Le bonhomme reprit :

— C’est l’eau et le feu !… Les Pontalès avaient