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tenant son visage qui annonçait une grande jeunesse, bien qu’il fût amaigri déjà et pâli par la souffrance.

C’était une physionomie pensive et hautaine où se devinait un cœur droit, mais défiant, et comme une sauvage ignorance de la vie.

— Monsieur, lui dit Montalt après avoir éloigné son noir du geste, répondez-moi franchement ou ne répondez pas du tout… c’est par l’effet de votre volonté que vous êtes tombé à la mer ?

— Oui…, répliqua le Breton qui tenait la tête haute et les yeux baissés.

Montalt le considérait avec une attention croissante et son regard arrivait à exprimer un degré d’intérêt extraordinaire. On eût dit que tout au fond de son âme engourdie de vifs souvenirs s’éveillaient.

— Vous êtes bien jeune, reprit-il, pour être fatigué déjà de la vie.

— J’ai plus de vingt ans, répliqua le matelot.

— Vingt ans !… murmura Montalt comme si ces mots se rapportaient à lui-même dans le passé.

Puis il ajouta :

— Pourquoi vouliez-vous mourir ?

Le Breton garda le silence.