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plus fous. En quelques jours, Londres avait su son nom, et connu ce visage indolent et hardi qu’on n’oubliait point après l’avoir regardé seulement une fois. À son insu, il avait été proclamé le roi de la mode, le lion, le dieu…

On parlait avec admiration de l’étrange roman de sa vie : Montalt avait gagné des batailles rangées et conquis des royaumes. Il ne manquait pas de gens pour citer les noms baroques de ses victoires et suppléer ainsi au défaut absolu de journaux qui se fait sentir dans l’empire de l’iman de Mascate.

Avant de vaincre les hommes, il avait, disait-on, mené une existence solitaire et sauvage dans l’intérieur de l’Afrique. Il avait terrassé les grands tigres du Soudan et lutté corps à corps avec les lions de l’Atlas…

C’était un héros. Sa gloire, méritée ou non, s’enflait sans relâche. L’invention s’additionnait avec la réalité pour lui faire une bizarre et romanesque renommée.

Et comme il passait, toujours insouciant et dédaigneux, au milieu de la foule, l’invention s’échauffait jusqu’à l’enthousiasme ; car la foule, semblable à une femme coquette, prodigue ses faveurs à qui ne les veut point.

Montalt était beau, jeune, noble. Il avait au plus haut degré ce prestige que donnent les