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Au dire d’écrivains sérieux et bien dignes de foi, quand la tempête gronde sur cette mer houleuse et terrible, c’est jour de grande fête pour les gens de ce pays. Derrière ces rocs noirs, il y a une population qui vit de naufrages, et qui, selon le théâtre de la Porte-Saint-Martin, habite d’immenses galeries souterraines où il se passe un nombre infini de choses dramatiques.

Dans ces grottes surprenantes, qui forment un curieux décor, tout acteur représentant un Breton doit ramper ou bondir, mais non pas marcher ; hurler ou glapir, mais non pas parler. Ces Bretons sont des sauvages et des cannibales. Volontiers nos romanciers leur donneraient-ils la massue et l’œil farouche de Polyphème ; volontiers nos faiseurs de vignettes, pour raffiner un peu sur la couleur locale, les dessineraient velus des pieds à la tête comme des orangs-outangs.

Leur réputation est faite désormais, et quelque jour, sur un théâtre quelconque, nous les verrons manger des femmes et des petits enfants, au grand plaisir de notre public parisien.

Pauvre Bretagne ! elle a pourtant des maires et des adjoints et des conseillers municipaux ! En conscience, a-t-on le droit de calomnier ainsi, sans pudeur, des gens qui sont jurés et