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point leur sauveur et le prenaient pour quelque fermier du pays.

Robert, en touchant du pied le bateau, avait repris son rôle avec un sang froid héroïque.

— Que Dieu vous récompense, mon brave ami ! dit-il en s’asseyant, épuisé, sur l’un des bancs. Vous avez sauvé la vie à un homme qui, ce matin encore, aurait pu vous récompenser royalement et faire de vous le métayer le plus riche de la contrée… Mais, à l’heure qu’il est, me voilà plus pauvre qu’un mendiant.

— Mon malheureux maître !… soupira Blaise en domestique fidèle et dévoué.

— Ne murmurons point, reprit Robert, le ciel pouvait nous prendre aussi nos vies.

— Vous avez perdu quelque chose ?… demanda le maître de Penhoël, tandis que Benoît Haligan perchait en silence dans la direction de Port-Corbeau.

— J’ai perdu de bien grosses sommes, mon brave ami, répondit Robert tristement ; et pour les remplacer il me faudra attendre longtemps, car mon pays est au delà de l’Océan… Mais pour ce qui vous regarde, j’espère que vous ne perdrez pas tout, et que M. le vicomte de Penhoël me viendra en aide pour payer cette dette sacrée.

— Vous connaissez le vicomte de Penhoël ?… demanda René avec étonnement.