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se rendre compte l’empêchait d’implorer l’aide de son lugubre compagnon.

— Savez-vous donc où ils sont ? demanda-t-il enfin pourtant.

— Oui, répliqua Benoît.

— Eh bien ! pourquoi ne prenez-vous pas la perche ?

— Parce que vous ne me l’avez pas ordonné.

— Qu’est-il besoin ?…

Le passeur l’interrompit.

— Penhoël, dit-il d’un ton triste, je n’ai pas beaucoup de jours à vivre désormais… mon corps est à vous, mais je veux garder mon âme… Je vous ai donné un bon conseil, c’est tout ce qu’un serviteur peut faire… Voulez-vous encore sauver ces étrangers au risque de votre vie sur cette terre et de votre salut dans l’autre monde ?

— Je le veux !… prononça Penhoël à voix basse.

— Eh bien ! donnez-moi vos ordres tout haut, afin que Dieu et le démon les entendent… Je sais bien que je ne sauverai pas mon corps… ces gens me tueront : c’est la loi mystérieuse… Mais la Vierge aura pitié de ma pauvre âme !

— Et moi ?… murmura involontairement Penhoël.