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— Ma chanson, murmura l’Ange.

Les deux filles de l’oncle Jean n’avaient jamais rien refusé à Blanche de Penhoël.

Quelques notes tristes et douces vibrèrent. L’Ange ferma les yeux, et l’on vit errer autour de sa bouche comme un reflet effacé de son joli sourire.

Les harpes poursuivaient le simple et mélodique prélude de la chanson bretonne.

Puis deux voix jeunes et pures se mêlèrent aux accords voilés des harpes. Cyprienne et Diane chantaient :

Anges de Dieu qui souriez dans l’ombre,
Blanches étoiles, vierges, fleurs,
Vous qui des nuits semez le manteau sombre,
Anges aimés, pour guérir nos terreurs…

C’était un de ces airs trouvés dans la veille triste par les bardes de Bretagne, quelques notes lentes, des larmes chantées qui savent le chemin du cœur.

Le vent glacé qui pesait sur toutes les poitrines s’attiédit. Une expression de repos se répandit sur le charmant visage de Blanche. Madame et Vincent de Penhoël, qui la regardaient, eurent comme un contre-coup de ce soudain bien-être. L’oncle Jean avait rejeté ses cheveux blancs en arrière ; ses yeux se perdirent au ciel ; il semblait parler à Dieu.