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s’étendait une rampe rocheuse dont les renflements soudains masquaient de temps à autre le large lointain des montagnes ; sur la droite, c’était la rivière encaissée profondément et dont les eaux invisibles semblaient communiquer à ces terrains brûlés une fertilité médiocre.

Le chemin et la rivière faisaient à chaque instant des coudes brusques, occasionnés par les brusques mouvements du sol. À l’un de ces détours, vers moitié route, entre Peyrelau et Milhau, notre voyageur se trouva tout à coup en face d’un paysage largement agrandi. La rampe de gauche se terminait soudain, comme si elle eût été tranchée par un gigantesque coup de pelle, et ses flancs ouverts laissaient voir les roches nues, brillant aux derniers rayons du soleil. Cet obstacle enlevé, tout le pays, de la route aux montagnes, se découvrait avec ses vastes friches, ses champs, ses cabanes clairsemées, qu’on devinait plutôt qu’on ne les voyait, grâce à la vrille de fumée bleuâtre qui s’échappait des toits de chaume.

Au fond, les Cévennes apparaissaient comme un grand mur de nuages, presque régulièrement crénelé. À droite un mamelon de forme ronde, couvert par une forêt, tranchait en noir au milieu de la plaine vivement émaillée par les rayons du couchant.

Notre voyageur, à l’aspect de ce panorama qui, certes, vous aurait intéressé par sa grandeur agreste et imprévue, poussa un long soupir de découragement.

— Point de château ! murmura-t-il ; pas l’om-