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dont la perte avait coûté tant de larmes, fût rendu à sa mère. Et pourtant Mélise sentait comme une main de souffrance qui lui étreignait le cœur.

Son angoisse n’était point de celles qui s’expliquent. Elle s’appuya au mur du corridor, prête qu’elle était à défaillir.

— Et tu le connais, Pola, reprit madame Éliane, Quand il va venir tout à l’heure, c’est un visage ami que tu vas saluer de tes baisers. Te souviens-tu de ce jeune soldat que notre bon Mitraille aimait tant ?

— Si je me souviens de Roger ! s’écria Pola. Oh ! c’est Mélise qui va être contente.

Mélise pressait à deux mains son cœur défaillant.

— Comme il est beau, n’est-ce pas, poursuivait la comtesse ; et bon, et brave !

— C’est donc Roger ?… bien vrai ?… demanda Pola.

— C’est Roger, répondit Éliane, qui est le comte de Pardaillan.

Les genoux de Mélise fléchirent et touchèrent les dalles du corridor.

— Roger ! balbutia-t-elle en un sanglot, comte de Pardaillan ! Je suis perdue !

La comtesse ajouta :

— Je puis te dire tout cela maintenant, ma fille. Nous ne craignons plus rien. Tous les bonheurs nous viennent à la fois. Le secret qui pesait sur ma vie va être connu et me laisser libre, avec un grand deuil, certes, un deuil inconsolable, mais sans crainte, du moins, pour l’avenir de mes enfanta bien-aimés.