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toujours le temps de voua couper la gorge, tandis que vous n’avez qu’une heure pour aller où le plus cher besoin de votre cœur vous appelle. Venez çà, maître Roger !

Roger obéit avec répugnance ; mais aux premiers mots prononcés pas Eatéban, tout bas à l’oreille, il tressaillit.

— Vous a-t-elle chargé de me porter ce message ? s’écria-t-il.

Estéban, au lieu de répondre, avait pris à part Gaëtan.

— Monsieur le chevalier, dit-il avec un courtois salut, un mot, je vous prie.

— Monsieur, répondit celui-ci, vous l’avez dit : je ne vous connais pas, et vous vous êtes mêlé déjà deux fois de mes affaires.

— Est-ce un reproche ? demanda le More en souriant.

— C’est une question, répliqua le jeune homme.

— Je vous demande, monsieur le chevalier, la permission de prendre mon temps pour y répondre. Aujourd’hui, nous n’avons pas le loisir : écoutez !

On entendait dans la ruelle le pas lourd et régulier d’une troupe d’hommes de guerre.

— Qu’est cela ! s’écria Gaëtan.

— Cela, répliqua le More, est pour moi ou pour vous. Si nous voyons tout à l’heure, à l’angle de cette muraille, l’uniforme de Richelieu-Bretagne, cela sera pour vous. M. le maréchal de la Meilleraye a fantaisie de vous envoyer rejoindre le brave Saint-Preuil, votre père. Ne m’interrompez pas : si nous reconnaissons, au contraire, le costume