Page:Féval - Le Fils du diable - Tomes 3-4.djvu/779

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le premier cavalier arrêta sa monture à l’endroit de la route qui se rapprochait le plus de l’arbre.

Il se pencha de manière à perdre presque les étriers.

— En revoyez-vous, monsieur Hervé ? demanda de loin le piqueur.

Hervé Gastel descendit de cheval et se mit à genoux sur la terre molle.

— Allez, chiens, tirez ! cria-t-il.

Les chiens arrivèrent en se poussant, et le nez à terre.

Ils mirent leur tête aux pieds du jeune veneur, qui prononça doucement :

— Volce lest, mes bellots !… Volce lest !

Les chiens donnèrent de la voix durant quelques secondes et s’élancèrent, en avant. Puis leurs cris s’affaiblirent et ils allèrent quêtant de droite et de gauche.

— Ce n’est pas le sanglier de meute, dit le piqueur.

— J’ai vu cela tout de suite ! ajouta le cavalier long et blond, qui arrivait par derrière.

— C’est un ragot, — reprit le piqueur, — qui a fait ses mangeures dans la Fosse-aux-Loups…

Le cavalier blond, qui n’était autre que Corentin Jaunin de la Baguenaudays, secoua ses énormes cheveux d’un air important et répéta :

— Ce n’est qu’un ragot… et je voudrais gager qu’il a été faire ses mangeures dans la Fosse-aux-Loups.

Le piqueur haussa les épaules.

— C’est pourtant vous, monsieur de la Baguenaudays, qui avez détourné les chiens et donné sur le change !

Corentin sourit d’un air content.

— Vous n’y êtes pas l’ami, répondit-il. — Je suis veneur jusqu’au bout des ongles… et si j’ai enlevé les chiens sur la voie, c’est que j’avais revu du sanglier de meute…

Il y paraît ! grommela le piqueur.

— En attendant, reprit Hervé Gastel, — nous avons perdu la chasse, et du diable si c’est gracieux de quêter ainsi à la billebaude !

— Voulez-vous que je sonne ? demanda Corentin Jaunin de la Baguenaudays.

Et, avant qu’Hervé eût pu répondre négativement, le long et blond hobereau emboucha sa trompe, dont il tira des sons impossibles.

Le piqueur et Hervé se bouchèrent les oreilles et prirent la fuite en enlevant les chiens qui crièrent plaintivement.

Corentin Jaunin de la Baguenaudays les suivit en cahotant sur son cheval et en achevant de sonner faux sa fanfare.

— Allons, mes toutous ! s’écria-t-il quand il eut fini ; — velci-vavau !… là-bas ! tout là-bas ! là-haut ! il y va ! — À tartarau !… au coût !… ha hais ! perce ! il perce !

Ayant ainsi mêlé au hasard tout ce qu’il savait du vocabulaire de vénerie,