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VI
LE RETOUR DE LA CHASSE


En quittant Martel auprès du pont de planches, jeté sur la petite rivière de Vanvre, M. le chevalier de Briant avait pris, comme nous l’avons dit, le chemin du château de Presmes.

De même que Martel, le chevalier arrivait de Paris : mais ils n’avaient point fait toute la route ensemble. — Ils s’étaient rencontrés seulement à quelques lieues au-dessus de Saint-Aubin-du-Cormier.

C’était, en vérité, un charmant compagnon que M. le chevalier de Briant. Il mêlait les élégantes façons d’un gentilhomme aux familiarités faciles d’un coureur d’aventures. Son esprit, légèrement railleur, avait des allures franches et de ces brusqueries qu’on aime… Son parler était vif, grasseyant, un peu emphatique et fanfaron : il allait merveilleusement à sa parole allègre et aux voiles gaillardes de son frivole entretien.

Ceux qui n’avaient jamais vu de Bas-Bretons auraient pu le prendre pour un Gascon.

Car, parmi les préjugés que nourrissent de père en fils, avec un soin précieux, les bonnes gens de Paris, celui qui donne la lourdeur grossière et la pesante sauvagerie en partage aux enfants de la Basse-Bretagne n’est pas le moins bizarre et le moins éloigné du vrai. — À part le paysan, qui est grave et dont la tristesse se teint de poésie, le Bas-Breton est en général vif, étourdi, rapide à devancer la pensée par la parole. Son accent précipité, qui roule et broie les mots au passage, est comme une révélation de sa nature fanfaronne. — Il ne doute de rien ; il se vante ; il fait du bruit ; il casse les assiettes. — C’est le Gascon, avec cette différence qu’il a bon cœur et bon poignet au service de ses vanteries.

Au bout d’un quart de lieue, M. le chevalier de Briant avait fait connaissance avec le jeune garde-française.

La tristesse de celui-ci eût déconcerté un interlocuteur moins intrépide, mais le chevalier ne détestait pas les partners silencieux.