Page:Féval - Le Fils du diable - Tomes 3-4.djvu/310

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Si Reinhold avait craint de manquer son coup de théâtre, il dut être rassuré complètement. Les quatre associés se levèrent tous à la fois.

— La cassette du baron ! s’écrièrent Mira et Petite.

— Avec mes lettres de change ? dit Van-Praët.

Le Madgyar seul ne prononça pas une parole.

Les papiers furent étendus sur la table qui venait de servir au déjeuner ; on en fit de l’œil un rapide inventaire. D’un seul regard, le clairvoyant Van-Praët découvrit ses lettres de change au milieu d’une trentaine d’autres chiffons.

Il les plaça dans son portefeuille, tandis que Mira maugréait, au fond du cœur, contre l’imprudence du chevalier.

Yanos, avec beaucoup moins d’empressement, prit aussi ses traites et les serra.

Mais cette trouvaille inespérée semblait vraiment le toucher assez peu.

Reinhold s’enflait comme un paon qui fait la roue.

— Je vous ferai remarquer, Messieurs, disait-il avec emphase, que ce diable de baron n’exagérait en rien la vérité, lorsqu’il nous disait que notre condamnation à tous était au fond de cette cassette… Voici toute notre correspondance de 1824 qu’il avait trouvée dans le secrétaire de son patron Zachœus… Brave Yanos, cette lettre est de vous !… Voilà votre signature, digne Van-Praët !… voici la mienne !… Et quant à vous, belle dame, cette épitre, qui contient de quoi faire pendre un homme, est écrite en entier de la main de votre vénérable père !… Ah ! ah ! depuis que l’association existe, je crois que personne ne peut se vanter de lui avoir rendu un service pareil !

— Il est certain, dit madame de Laurens, que vous avez droit à nos remerciements, M. de Reinhold.

— Moi, je vous vote toute sorte d’actions de grâces, mon bien-aimé camarade, s’écria Van-Praët attendri à la pensée de ses lettres de change.

Mira gardait le silence ; il pensait que le chevalier aurait bien pu trouver tout cela et le garder pour lui.

— Maintenant, reprit Petite, qui n’était pas femme à perdre de vue son idée, M. de Rodach est sans armes contre nous… rien n’empêche