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» — Tiens, tiens, dit-il seulement, voilà le bausse.

» C’est le nom qu’on me donne au Temple.

» — Où as-tu pris ces papiers, Geignolet ? demandai-je d’un air sévère.

» Il me toisa de son œil morne et farouche.

» — Je suis plus grand que vous, murmura-t-il ; si vous voulez me faire du mal, je vous jetterai dans le trou.

» — Je ne veux pas te faire de mal, mon pauvre enfant… mais j’aime beaucoup les vieux papiers, et si tu veux, je t’achèterai ceux-ci.

» — Combien ? s’écria l’idiot dont les yeux brillèrent.

» — Ce que tu voudras.

» Il arrondit ses deux mains jointes en forme de vase, puis il secoua la tête, ne trouvant pas le récipient assez ; volumineux.

» — Ma casquette ! s’écria-t-il, en découvrant sa tête hérissée ; je veux plein ma casquette de sous.

» — Tu les auras, dis-je, et je tirai de ma poche trois ou quatre pièces de cinq francs qui étaient assurément l’équivalent, pour le moins, du prix demandé.

» Mais ce n’était pas le compte de l’idiot.

» Il secoua gravement la tête, et me montra sa casquette tendue.

» Je fus obligé de prendre ma course et d’aller changer mes pièces de cinq francs contre des gros sous dans la ferme la plus voisine. »

— Et quand vous revîntes, interrompit Petite, vous eûtes les papiers ?

— Attendez donc, belle dame !…

— Non, interrompit le Madgyar à son tour ; moi je ne veux plus attendre !

Reinhold avait fait provision de style et de couleur pour rendre cette partie de son récit pittoresque et attachante ; il jeta un regard piteux vers le Madgyar et n’osa point désobéir.

— Allons ! dit-il en essayant de sourire, je suis seul contre quatre.

Et avec une répugnance visible, où perçait encore pourtant une bonne dose de vanité triomphante, il entr’ouvrit les revers de son paletot blanc.

— Ces papiers, dit-il, les voici… c’est tout bonnement le contenu de la fameuse cassette.