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— Il a d’autres protecteurs que cela ! murmura madame de Laurens.

— Ah ! soupira le Hollandais, — si j’étais vaillant et fort comme notre brave ami le Madgyar, je ne laisserais pas ainsi l’association dans l’embarras !… Par le diable ! il y aurait longtemps que j’aurais cherché querelle au petit coquin, pour avoir un prétexte de l’envoyer en l’autre monde !

Cette sortie était si peu d’accord avec les mœurs habituelles du doux Fabricius, que Mira et Petite le regardèrent en même temps.

Il se prit à cligner de l’œil d’un air d’intelligence ; — son but évident était d’échauffer le Madgyar.

Mais celui-ci semblait ne point entendre, il demeurait immobile et plongé toujours dans ses noires pensées.

Le Hollandais haussa les épaules avec dépit.

— Quelqu’un de vous, demanda tout à coup madame de Laurens, a-t-il connaissance de l’arrivée de M. le baron de Rodach dans le pays ?…

Klaus, qui pliait la nappe avec une lenteur calculée, eut un tressaillement.

Van-Praët et Mira ouvrirent de grands yeux étonnés.

— Le baron de Rodach !… prononcèrent-ils tous les trois à la fois.

— Y pensez-vous, chère belle ? ajouta Fabricius ; — hier même la maison a reçu de l’argent et une lettre du baron datée de Paris.

— Qu’importe ? dit Sara.

— Il me semble…

— Les tours de force ne lui coûtent rien !… Avez-vous oublié cette étrange fantasmagorie qui est restée pour nous inexplicable ?…

— Paris, Londres, Amsterdam !… prononça d’une voix creuse le Madgyar, qui regardait toujours Sara en face.

— Si je ne m’étais pas assuré par moi-même, en passant à Francfort, murmura le docteur, de la présence des trois bâtards…

— Mais, vous vous en êtes assuré, interrompit Petite, vous, Reinhold, et moi… Il est moins difficile d’être à la fois à Paris et à Geldberg qu’en même temps à Londres, à Amsterdam et à Paris.

Yanos fit un signe de tête affirmatif et crédule.

— En bonne logique, dit Fabricius dont la sérénité se troublait pourtant un peu, on ne conclut jamais d’un miracle à un autre.