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rafe, lequel avait laissé la direction de son établissement au neveu Nicolas.

En ajoutant à ces trois départs ceux de Jean Regnault, de Mâlou, de Pitois et de Fritz, on verra que nous avions raison de dire que le Temple avait profondément ressenti le contre-coup de la fête de Geldberg.

Mais nous sommes encore bien loin de compte, et nous n’avons pas mentionné tous les voyageurs que le marché devait envoyer en Allemagne.

À surfaces égales, le bazar en guenilles fournissait vraiment plus de membres à la brillante fête que n’importe quel quartier de la Chaussée d’Antin ou des nobles faubourgs.

Il y avait d’abord Hermann et tous les convives allemands, anciens serviteurs de Bluthaupt, que nous avons vus trinquer gaiement le soir du dimanche-gras, dans la salle de la Girafe.

Ces bons garçons arrangeaient aussi leurs affaires et terminaient leurs préparatifs, car Hans Dorn avait parlé.

Hans avait parlé au nom d’un maître auquel chacun se faisait une joie d’obéir.

Ils n’étaient pas riches et ils risquaient l’existence de leur famille, en désertant le travail de chaque jour, mais ils étaient dévoués ; ils allaient, pleins d’enthousiasme, et leurs cœurs battaient à la pensée de la patrie.

Hans Dorn, qui était leur chef, ne pouvait les laisser en arrière. Tout était sens dessus dessous dans sa maison ; tandis qu’il arrêtait ses derniers comptes en homme d’ordre, la jolie Gertraud s’évertuait à faire malles et valises.

Elle n’avait jamais quitté Paris ; un voyage était pour elle l’inconnu et le mystérieux ; elle avait l’idée fixe de munir son père, de l’approvisionner complètement pour cette excursion lointaine.

Elle empilait dans la malle linge sur linge, habit sur habit ; elle se désespérait de la voir si petite ; elle y aurait mis volontiers les chaises, la table et le lit.

On peut avoir besoin de tout cela en voyage.

Aux habits, Gertraud joignait des robes, des tabliers, des fichus, des bonnets, tout le matériel enfin de sa fraîche toilette d’ouvrière aisée.

Car, elle aussi avait sa place retenue à la diligence.

Le marchand d’habits avait hésité longtemps en songeant à la besogne