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La rue, sans être déserte, n’avait point de foule qui pût gêner le regard ; le baron jeta les yeux de tous côtés, et ne découvrit point l’issue par où le mystérieux vieillard avait pu s’évanouir.

Il demeura un instant désorienté. Aux environs, il n’y avait ni ruelles ni allées ; toutes les maisons voisines étaient closes, comme c’est assez l’habitude dans le quartier de la Madeleine.

C’était un véritable coup de théâtre. Rodach, qui ne pouvait comprendre cette disparition soudaine, s’obstinait à fouiller du regard les enfoncements des portes cochères et les moindres recoins, comme s’il se fût attendu sans cesse à voir surgir quelque part la figure jaune et plissée, derrière son vaste abat-jour.

Rien ! En désespoir de cause, Rodach rebroussa chemin vers l’hôtel de Geldberg.

Mais au bout de quelques pas, il se ravisa, et sa montre consultée, lui rappela une tâche nouvelle. Précisément à l’endroit où il s’était arrêté naguère, stationnait une citadine dont les stores étaient baissés ; les chevaux abandonnés à eux-mêmes, prenaient leur repas dans de longs sacs de toile.

Rodach chercha des yeux le cocher absent et mit la main sur la poignée de la portière.

— Il y a quelqu’un, dit une voix de vieille femme à l’intérieur.

Rodach n’en attendit pas davantage, et hâta sa marche vers le boulevard.

À peine avait-il disparu, que la portière de la citadine s’ouvrit sans bruit et avec lenteur. Le bonhomme à la houppelande montra timidement sa large visière, sous laquelle il y avait un sourire sournois.

Il avait manifestement envie de rester quelque temps encore dans sa cachette ; mais le cocher de la citadine, qui avait terminé ses libations matinales au cabaret prochain, revenait à ses chevaux.

— Le coquin serait capable de me faire payer la course ! grommela le bonhomme qui l’aperçut de loin.

Il descendit et reprit sa route au pas accéléré, pour réparer le temps perdu…

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