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à être absolument libre en voyage, et, je ne donne jamais mon adresse.

Le chevalier eut un malicieux sourire, et fit du doigt une menace maligne.

— Quelque histoire amoureuse ! je gage ! s’écria-t-il. Nous ne sommes pas sans savoir qu’il y a de belles dames en Allemagne ; et M. le baron n’est sans doute pas seul.

— Permis à vous de donner carrière à votre imagination, monsieur le chevalier.

— Mille pardons si j’ai été indiscret ! mais il faut pourtant que vous ayez ces documents avant votre départ.

— Voici bien une chose qui arrangerait la difficulté, — mais j’ai peur de déranger encore vos habitudes…

— Voyons, dit Rodach.

— D’ici à Boulogne, la diligence va plus vite que la malle-poste…

— Je vais arrêter ma place en sortant d’ici.

— Si vous n’y voyiez pas d’empêchement, j’aurais l’honneur de vous conduire jusqu’aux messageries et nous causerions en chemin.

Tout en parlant Reinhold se faisait le même raisonnement qu’Abel de Geldberg, et il se disait, lui aussi :

— Comme cela je serai bien sûr de mon homme, et tout faux-bond sera impossible…

Mais Rodach n’avait nulle envie de se soustraire à cette épreuve.

— Cela m’arrange parfaitement, répondit-il ; je serai chez vous demain de bonne heure, et nous partirons ensemble… Maintenant je vous laisse à vos affaires, monsieur le chevalier, et je vous souhaite bonne chance.

Il se dirigea vers la porte ; Reinhold, afin de lui faire les honneurs de la maison, le suivit en continuant la conversation commencée, et voulut l’accompagner jusque dans la cour.

Ils descendirent ensemble l’escalier principal et traversèrent les bureaux où les employés étaient en train de plier bagage.

Dans l’antichambre, il n’y avait plus qu’une seule personne assise sur les banquettes de maroquin vert.

Klaus continuait de s’y promener de long en large, avec son grave habit noir.