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— Avez-vous donc quelque moyen ?… demanda vivement Reinhoîd.

— C’est encore un peu vague dans mon esprit, répliqua Rodach ; mais j’ai soulevé des obstacles plus lourds que celui-là, et je puis vous dire : Ayez l’esprit tranquille…

Rcinhold ne demandait pas mieux que de prendre confiance : il se leva d’un front rasséréné déjà, et secoua cordialement la main de Rodach.

— Vous êtes notre providence, monsieur le baron ! dit-il tout haut.

Puis il ajouta, en se penchant à son oreille :

— Mais n’oubliez pas, je vous prie, que je vous attends chez moi dans une heure…

Rodach s’inclina, et Reinhoîd sortit.

Dès que la porte fut retombée derrière lui, le docteur avança son fauteuil et tâcha de se donner un air tout aimable.

Ce fut, à peu de choses près, sans succès, il faut bien le dire. Néanmoins, son visage prit une teinte beaucoup moins sinistre, et ses yeux caves eurent presque un sourire.

Quand il eut approché son siège à la distance jugée par lui convenable, il sortit de sa poche une large tabatière d’or, qu’il caressa d’un air méditatif.

Cela dura une seconde. Au bout de ce temps, il mit la tabatière sur le marbre de la cheminée, et se frotta les mains avec activité, en clignant des deux yeux tour à tour.

Le baron attendait.

Le docteur toussa, mangea une tablette contre le rhume et lissa du doigt ses rudes sourcils.

Rodach attendait, plus grave et plus froid que jamais.

— Oui, oui, dit enfin le docteur qui sembla soulever une montagne ; — oui certes, monsieur… c’est positivement mon opinion.

— Quoi donc ? demanda Rodach.

— À savoir, monsieur le baron, que vous êtes en ce moment la providence de la maison de Geldberg… Quand vous êtes arrivé, je ne vous cacherai point qu’un soupçon m’est venu…

— Quel soupçon ?

— C’est à peu près sans importance ; car, je ne vous le dissimulerai