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question de savoir s’il ne fallait point le chasser comme un misérable, et maintenant il semblait le maître.

— J’étais là pendant que vous causiez avec votre caissier… reprit-il.

— Et vous vous êtes permis d’écouter ? interrompit le jeune M. de Geldberg, qui eut comme une dernière velléité de faire le hautain.

— Je ne puis dire non, répliqua M. de Rodach ; — j’ai entendu à très peu de chose près tout ce que vous avez dit à votre caissier, et tout ce que vous vous êtes dit entre vous après le départ de ce brave homme… Mais que cela ne vous désole pas, mes chers Messieurs ; vous avez été en tout ceci remarquablement discrets, et si je n’en savais pas plus long que cela, mon Dieu ! vous n’auriez pas besoin de me craindre !…

— Avons-nous donc à vous craindre ? demanda M. de Reinhold sans perdre son sourire.

— Oui, monsieur le chevalier… Ce caissier me paraît un digne serviteur, mais un peu exigeant… Il a cependant oublié un compte parmi ceux qu’il vous a demandés.

— Comment cela ? dit Reinhold.

— Il a exigé, ce me semble, le compte Van-Praët, d’Amsterdam ; le compte Yanos Georgyi, de Londres ; et le compte de Laurens, de Paris… Mais il n’a point parlé du compte Zachœus Nesmer, de Francfort-sur-le-Mein…

La figure de José Mira s’assombrit davantage. Le jeune M. de Geldberg devint sérieusement attentif.

— Mais, dit encore Reinhold, qui avait de la peine à garder son sourire ; — notre correspondant et ami le patricien Zachœus Nesmer est mort…

— C’est vrai, monsieur le chevalier.

— Et il n’a point laissé d’héritier…

— Si fait, Monsieur, un neveu, fils de sa sœur, qui est encore enfant, et à qui les lois ont donné un tuteur… Pour en revenir à votre caissier, mon arrivée vous met à ce sujet hors de peine. Si vous renvoyez le bonhomme, je m’offre en effet à le remplacer ; si vous tenez à le garder, je puis vous fournir à l’instant même les vingt mille francs qu’il demande.

— Mais, Monsieur, murmura le chevalier, — la maison de Geldberg…