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Il n’y avait plus rien dans tout cela, sinon les bizarreries d’une nuit de carnaval. — Le hasard avait tout fait ; — le beau rêve s’enfuyait, et Franz se retrouvait seul.

Et sa nature mutine se révoltait énergiquement contre l’émotion vingt fois repoussée de ce songe qui venait toujours l’assaillir…

Il se redressa tout à coup, et rappela son sourire décidé.

— Allez me chercher mes habits, père Hans, dit-il ; — je ne suis pas venu ici pour vous raconter des histoires larmoyantes… Parbleu ! j’ai de l’argent plein mes poches et je ne l’ai pas volé… que me faut-il de plus ?… Je serais bien bon de me creuser la tête à chercher l’impossible !

Hans se leva sans mot dire et se dirigea vers un cabinet noir où étaient pendues, sous une toile, les plus précieuses de ses marchandises.

Franz était seul de nouveau avec Gertraud.

La jeune fille avait repris son aiguille, et ses doigts déliés suivaient le dessin harmonieux de sa broderie.

— Est-ce pour vous cette collerette, Gertraud ? demanda Franz, pour dire quelque chose.

— Oh ! non, répondit la jeune fille ; je ne suis pas assez riche pour porter cela.

— Et pour qui est-ce ?

— Pour une demoiselle que vous pouvez bien connaître, car vous avez prononcé son nom tout à l’heure.

— J’ai prononcé le nom d’une demoiselle ?… commença Franz qui ne se souvenait point.

— Le nom de son frère, du moins, dit Gertraud.

— C’est pour Denise ? s’écria Franz vivement.

Et tout de suite, après avoir parlé, il se repentit et se mordit la lèvre en rougissant.

Gertraud avait relevé sur lui ses grands yeux limpides, qui semblaient interroger.

— Elle est bien jolie ! murmura-t-elle ; — oh ! et bien bonne, mademoiselle Denise d’Audemer !… Il y a longtemps que mon père connait sa famille, et je vais la voir quelquefois. Bien que je ne sois qu’une pauvre petite ouvrière, elle cause avec moi comme si j’étais son amie… Oh ! si vous