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LE BOSSU.

» Il sortit. Je fondis en larmes.

» — Ah ! me disais-je, — il ne m’aime pas ! Il ne m’aimera jamais !

» Et chaque fois que je pleure, ma mère, c’est que cette idée-là me revient. Henri ne m’aime pas ! Henri ne m’aimera jamais !…

» Cependant…

» Hélas ! on cherche à se tromper soi-même. Il me chérit comme si j’étais sa fille. Il m’aime pour moi, non pour lui. — Je mourrai jeune.

» Le départ fut fixé à dix heures de nuit. Je devais monter en chaise avec Françoise. Henri devait nous escorter en compagnie de quatre espadins. Il était riche.

» Pendant que je faisais mes malles, le jardin d’Ossuna s’illuminait. M. le prince de Gonzague donnait une grande fête cette nuit-là. — J’étais triste et découragée. — La pensée me vint que les plaisirs de ce monde brillant tromperaient peut-être ma peine.

» Vous savez cela, vous, ma mère ? Sont-elles soulagées celles qui souffrent et qui peuvent se réfugier dans ces joies ?

» Je vous parle maintenant de choses toutes récentes. C’était hier. Quelques mois se sont à peine écoulés depuis que nous avons quitté Madrid.