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LE BOSSU.

trés sont également gentilshommes. — Autour du village, la terre reste en friche. Il passe toujours bien assez de voyageurs, si déserte que soit la route, pour que les cent et un gentilshommes et leurs familles aient un oignon à manger par jour.

» L’alcade, meilleur gentilhomme que ses concitoyens, est aussi plus voleur et plus gourmand. On a vu de ces autocrates manger jusqu’à deux oignons en vingt-quatre heures. — Mais ceux qui font ainsi un dieu de leur ventre finissent mal. L’espingole les guette. Il ne faut pas que l’opulence abuse insolemment des dons du ciel.

» Il est rare qu’on trouve à manger dans les auberges. Elles sont instituées pour couper la gorge aux voyageurs, qui s’en vont sans souper dans l’autre monde.

» Le posadero, homme fier et taciturne, vous fournit un petit tas de paille recouvert d’une loque grise : c’est un lit. — Si par hasard on ne vous a pas égorgé dans la nuit, vous payez et vous partez sans déjeuner.

» Inutile de parler des moines et des alguazils. Les gueux à escopettes sont également connus dans l’univers entier. Personne n’ignore que les muletiers sont les associés naturels des brigands de la montagne.