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LE BOSSU.

» Son pourpoint s’en allait, mais j’avais toujours de bonnes robes.

» Une fois, je le surpris l’aiguille à la main, essayant une reprise à ma jupe déchirée…

» Oh ! ne riez pas, ne riez pas, ma mère ! c’était Lagardère qui faisait cela, le chevalier Henri de Lagardère, — l’homme devant qui tombent ou s’abaissent les plus redoutables épées !

» Le dimanche, quand il avait bouclé mes cheveux et noué ma résille, quand il avait rendu brillants comme l’or les boutons de cuivre de mon petit corsage et noué autour de mon cou ma croix d’acier — son premier présent — à l’aide d’un ruban de velours, il me conduisait bien brave et bien fière à l’église des dominicains de la basse ville. Nous entendions la messe ; il était devenu pieux par moi et pour moi. Puis, la messe finie, nous franchissions les murs, laissant derrière nous la cité sombre et triste.

» Comme le grand air était bon à nos pauvres poitrines prisonnières ! comme le soleil était radieux et doux !

» Nous allions par les campagnes désertes. Il voulait être de mes jeux. Il était plus enfant que moi.

» Vers le haut du jour, quand la fatigue me prenait, il me conduisait à l’ombre d’un bois