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LE BOSSU.

était Villedieu, en basse Normandie, cité qui le dispute au fameux cru de Condé-sur-Noireau pour la production des bons drilles.

Ses amis l’appelaient volontiers frère Passepoil, soit à cause de sa tournure cléricale, soit parce qu’il avait été valet de barbier et rat d’officine chimique avant de ceindre l’épée.

Il était laid de toutes pièces, malgré l’éclair sentimental qui s’allumait dans ses petits yeux bleus clignotants quand une jupe de futaine rouge traversait le sentier. Au contraire, Cocardasse junior pouvait passer par tous pays pour un très-beau coquin.

Ils allaient tous deux cahin-caha sous le soleil du Midi. Chaque caillou de la route faisait broncher le bidet de Cocardasse, et tous les vingt-cinq pas le roussin de Passepoil avait des caprices.

— Eh donc ! mon bon, dit Cocardasse avec un redoutable accent gascon, voilà deux heures que nous apercevons ce diable de château sur sa montagne maudite… Il me semble qu’il marche aussi vite que nous.

Passepoil répondit, chantant du nez selon la gamme normande :

— Patience ! patience ! nous arriverons toujours assez tôt pour ce que nous avons à faire là-bas…