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LE BOSSU.

Lagardère fourbissait paisiblement son épée avec le pan de sa jaquette.

— Ce n’était pas M. de Caylus, dit-il, c’était un jeune homme. Mais ne nous perdons pas en suppositions, monsieur le duc ; quel que soit le nom de ce misérable, c’est un gaillard habile. Ses mesures étaient prises admirablement : il savait jusqu’à votre mot de passe. C’est à l’aide de ce mot que j’ai pu tromper Aurore de Caylus. Ah ! celle-là vous aime, entendez-vous ! et j’aurais voulu baiser la terre à ses pieds pour faire pénitence de mes fatuités folles. Voyons ! s’interrompit-il, n’ai-je plus rien à vous dire ? Rien, sinon qu’il y a un paquet scellé sous la pelisse de l’enfant : son acte de naissance et votre acte de mariage. Ah ! ah ! ma belle ! fit-il en admirant son épée fourbie, qui semblait attirer tous les pâles rayons épars dans la nuit, et qui les renvoyait en une gerbe de fugitives étincelles, voici notre toilette achevée… Nous avons fait assez de fredaines ! Nous allons nous mettre en branle pour une bonne cause, mademoiselle… et tenez-vous bien !

Le jeune duc serra sa main dans les deux siennes.

— Lagardère, dit-il d’une voix profondément émue, je ne vous connaissais pas… Vous êtes un noble cœur !