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LA CAVALIÈRE

son carrosse aussi bariolé qu’elle-même et bourré de plus d’emplettes que la grande Hélène n’en avait convoyé avec son bataillon de portefaix. Il était nuit tombée. Deux éclaireurs couraient devant l’équipage avec des torches, et l’épouse Boër, enrubannée comme une offrande, avait la joie de voir toutes les fenêtres curieuses s’ouvrir sur son passage.

Elle était seule, hélas ! avec ses marchandises, dont l’achat fastueux lui avait donné tant de popularité à la foire. Elle eût cédé toutes ses marchandises, et le double, le triple, et ses rubans, et ses fleurs, et son rouge, et ses mouches, et tout, pour avoir là auprès d’elle un poète susceptible de lui rimer un madrigal, comme ceux qu’elle avait tant admirés dans l’almanach des muses. Cette lourde allemande adorait ce qu’on appelait alors « la poésie légère. »

Malheureusement il y avait comme une malédiction sur elle. L’infortunée comtesse en était réduite à son Roboam, un Hollandais jaune,