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pital Necker, à Paris, où il a fait un stage de deux années, le docteur Randall, bien qu’on l’eût dit très habile, ne faisait que vivre avec sa profession.

Depuis assez longtemps il regardait Violette d’un œil qui n’était pas indifférent.

Aimait-il Violette ?… Ou en voulait-il seulement aux millions de la riche héritière ?

Cette dernière hypothèse semble la plus plausible. Car Randall était pauvre : son père, qui avait été médecin aussi, ne lui avait laissé aucun bien. Or, ce Randall avait parait-il, des goûts élevés, il aimait le plaisir et le luxe, et seuls les millions de l’ex-industriel pouvaient satisfaire ses ambitions et ses caprices.

Le fils avait succédé au père comme médecin de Harold Spalding. Mais Violette, chaque fois qu’elle avait dû avoir recours à la science médicale, s’était adressée ailleurs : Randall lui faisait peur !

Ce Randall avait, nous le répétons, dans ses yeux noirs et brillants quelque chose de faux et d’horriblement audacieux, et sur ses lèvres souvent un sourire cruel. Oui, Violette éprouvait une peur instinctive pour cet homme.

Et lui, quand il rencontrait Violette, soit chez Harold, soit dans la société, il avait pour la jeune fille de ces regards et de ces sourires qui l’épouvantaient. Aussi s’efforçait-elle de répondre par une froideur hautaine.

Elle avait cru deviner dans ce personnage bien des passions mauvaises qui, le jour où elles se déchaîneraient, pourraient être la cause de quelque horrible catastrophe.

Autant que possible Violette évitait le Docteur.

À une grande soirée elle lui avait même fait l’impolitesse de lui refuser une valse.

Le docteur en avait été très mortifié. Des idées terribles avaient de ce soir germé au fond de son cerveau.

Il n’avait cependant rien laissé transpirer de ses impressions intérieures ; il s’était simplement incliné devant la jeune fille pour se perdre bientôt dans la foule des invités. Seulement, un sourire ironique et mauvais avait plissé ses lèvres.

Plus tard, un matin de très bonne heure, il avait surpris Violette sortant de l’école de Jules Marion.

Bien que le visage de la jeune fille fut caché sous une épaisse voilette, Randall l’avait de suite reconnue à sa démarche.

— Oh ! oh ! se dit-il avec sourire sardonique, voici une découverte qu’il me faudra approfondir ! Tiens ! Tiens ! je prendrai dorénavant l’habitude excellente de venir digérer de ce côté ma collation du matin.

En effet, à deux ou trois reprises, Randall