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— et d’aucunes se plaisent à répéter — Oh ! pas bien fort — que ce pauvre Harold est timide comme une jeune fille et doux comme un mouton.

Chose assez curieuse, les gens qui l’ont connu au temps où il était propriétaire et directeur de vastes scieries, ses anciens employés tout particulièrement, ne se gênent pas de dire à qui veut les entendre que l’ex-industriel est affligé d’un caractère violent, brutal. On dit même que c’est un homme impossible.

Quoi qu’on eût dit et quoi qu’on dise, il est certain que Harold est une de ces chaudes natures qui s’emportent aisément, soulèvent des vacarmes épouvantables à propos de rien, crient, ragent, tempêtent, font le diable à quatre toujours pour rien !

Rancunier, parait-il, il n’oublie pas facilement les contrariétés ou les ennuis qu’on a eu l’imprudence de lui causer, — moins encore un geste de menace ou une parole outrageante.

Mais nous laisserons à notre lecteur le loisir d’apprécier à sa juste valeur, au cours de ce récit, le caractère énigmatique de cet homme.

Quant à son influence politique, disons seulement qu’elle est considérable ; et en 1911, Harold Spalding a été un des leviers qui ont porté M. Borden au pouvoir.

Disons encore, pour terminer cette esquisse, que l’opinion publique reconnaît Harold Spalding comme l’un de ces loyaux Anglais qui prétendent mettre toute leur énergie à l’agrandissement et à la consolidation de l’Empire Britannique, à sa puissance, à sa gloire. D’aucuns le disent plus anglais que le roi Georges !…

En même temps que la grandeur de l’Union Jack, il veut un grand Canada… un Canada plus homogène, plus attaché à la grande patrie, un Canada « exclusivement anglais ». Car, pour lui, le mot « canadien » n’existe pas, et il ne saurait exister un « Canada Canadien » ! Or, pour parfaire un Canada anglais, il faut établir au pays l’unité de croyances et de cultes autant que possible, mais surtout et à tout prix l’unité de langue ; et cela contre toutes les lois établies et les droits reconnus.

Harold Spalding a donc décidé de prescrire de l’école l’enseignement de la langue française ; il veut détruire, si cela est possible, une langue qu’il a apprise, qu’il parle couramment, et qu’il a fait apprendre à sa fille Violette.

Enfin c’est l’un des plus zélés chefs de cette société des Orangistes qui, sous le règne de Guillaume iii, d’Angleterre, ont tant fait contre le catholicisme qu’ils voulaient effacer des Îles Britanniques. Et Harold est l’infatigable partisan de ces mêmes Orangistes qui, venus au Canada, ont continué leur œuvre acharnée contre l’Église de Rome.