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Il menaçait encore.

— Monsieur Spalding, cette clef, il faudra que vous me la preniez de force, comme vous m’avez sorti de l’école par la force.

Spalding eut un geste terrible.

— Vous voulez donc que je vous batte comme un chien ? grinça-t-il.

Et plus menaçant il se rapprocha de l’abbé.

De la foule s’éleva un murmure de protestation.

Puis des cris partirent de cette même foule :

— À bas Spalding !

— Qu’on l’arrête !

— C’est une honte !

Une seconde, le millionnaire hésita. Mais emporté par la violence de sa haine, prêt à défier la tourbe, prêt à défier le ciel, il leva son poing pour frapper le prêtre au visage.

À la minute même une main nerveuse et solide saisit par derrière le poignet de Harold, et une voix, qui lui fit pousser un rugissement terrible, prononça :

— Monsieur, je vous défie d’aller plus loin !

Interloqué, Harold Spalding voyait se dresser devant lui, fier et superbe dans son habit militaire, Jules Marion.

Un murmure d’admiration et de plaisir en même temps s’échappa des lèvres de la foule toujours plus compacte ; quelques applaudissements éclatèrent çà et là.

Harold, parvenant enfin à calmer sa stupeur, put demander d’une voix mal affermie :

— De quel droit vous mêlez-vous à tout ceci ?

— Du droit de tout fils adoptif de défendre son père d’adoption, répondit froidement Jules Marion en lâchant le poignet de Spalding.

— Merci, mon fils ! murmura l’abbé d’une voix attendrie.

Mais Harold Spalding, plus enragé que jamais, voulut à nouveau se jeter sur l’abbé.

Cette fois Jules perdit contenance : il leva son poing et l’abattit de toute sa force sur la figure du millionnaire qui, sous le choc, chancela et recula de quelques pas.

Un grand silence se fit tout à coup sur cette scène.

Jules, les bras croisés maintenant, disait à Spalding, qui de ses deux mains étreignait sa face sanglante :

— À présent, monsieur Spalding, retirez-vous !

À ce moment, dans la foule qui se pressait de plus en plus autour de cette scène étrange et tragique, il se produisit un mouvement insolite… comme un remou. Des gens se bousculèrent, se heurtèrent, des jurons retentirent. Puis des personnes s’empressèrent vivement autour d’une jeune fille qui venait de s’évanouir.

L’instant d’après, ces personnes charitables