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gerbes de fleurs !… Il tombe des roses, des marguerites des violettes, — il tombe de toutes les fleurs… il tombe des sourires, il tombe des pleurs, il tombe des baisers !…

Dans cette foule où toutes les croyances, tous les cultes, toutes les nationalités se coudoient, on voit d’abondantes larmes couler !…

On voit des femmes s’agenouiller, tenant dans leurs bras tendus des enfants qui balbutient avec ivresse :

— Ah ! que c’est beau !

On voit des vieillards se découvrir respectueusement, et de leurs regards attendris et humides, on peut voir de furtives larmes rouler sur leurs barbes blanches comme des perles glissant sur des marbres !

Puis, sous l’avalanche de gerbes fleuries de sourires, de pleurs, d’ovations enthousiastes, on voit des fronts d’airain s’incliner à leur tour !

Les fanatismes sont ébranlés, les haines de race s’éclipsent, les préjugés s’envolent, et tous les fronts s’inclinent, émus, saisis, tous les cœurs s’élèvent à l’unisson pour chanter la gloire des grands mutilés de la vaillante race française !…

Car c’est une France qui passe… ce sont des poilus… et les enfants ont bégayé avec ivresse :

— Ah ! que c’est beau !

Oui ils étaient beaux ceux qui venaient de lutter là-bas, pour la liberté et la civilisation, tout en donnant un peu de leur sang et un peu de leur chair pour la sauvegarde de leur foi et de leur langue.

Oui, ils étaient beaux ceux qui, pour répondre à leurs persécuteurs qui les avaient appelés déloyaux et dégénérés, à ces persécuteurs qui s’acharnaient à leurs droits les plus chers, les plus sacrés, s’étaient héroïquement jetés sous la pluie de mitraille meurtrière !

Et cela, c’était leur revanche à ces héros de notre race… c’était la revanche d’une race !

Comme l’avait dit Jules Marion, comme l’avait répété l’abbé Marcotte, comme l’avait proclamé Harold Spalding, de même la nationalité canadienne-française pouvait dire dans un cri de triomphe : Voilà ma revanche !…

C’était la revanche et c’était la victoire…


II

L’ÉTRANGE MIRACLE


Que deviennent, depuis si longtemps, la mère de notre héros, cette pauvre aveugle à l’âme si patriotique, et cette terrible Angèle, avec son cœur d’or ?

On ne pourrait douter de l’anxiété mortelle et de l’intérêt immense qui les tenaient en haleine en suivant, au jour le jour, les péripéties de la grande guerre.

Et dans les journaux ce qu’elles lisaient d’a-