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Violette… tu m’entends, n’est-ce pas ?… tu seras sa petite femme à ton héros ! Oui je te le promets, Violette ! Mais souris-moi donc de ces lèvres trop pâles !… Regarde-moi donc de ces yeux qui dorment !… Ah ! Violette, Violette, achève l’œuvre commencée par le saint abbé ! Rends-moi heureux afin que je puisse te rendre heureuse à mon tour en t’unissant à Jules ! Ah ! Dieu puissant… elle est sauvée !… Tenez ! monsieur l’abbé, voyez-vous qu’elle me regarde et qu’elle me sourit ?

Puis, à Jules vers qui il est allé :

— Regardez… ah ! misère ! vous ne la voyez pas… mais elle vous voit ! N’est-ce pas, Violette, que tu le vois lui ? Eh bien ! il est à toi tout à toi, méchante !… Mais oui, puisque je l’ai promit !

Et Violette, les yeux ouverts, regardait Jules, son père, l’abbé Marcotte, et elle leur souriait à tous trois.

Harold fou de joie, embrassait à pleines lèvres sa fille qui vivait encore.

Il exultait, délirait, divaguait. Vraiment, il avait l’air de devenir fou tout à fait.

Enfin, au bout de quelques minutes, il parut retrouver son sérieux et son calme, et s’écria :

— Suis-je stupide, ma Violette, de te dorloter ainsi, comme si tu étais une enfant toute jeune et toute petite ! Mais non… vous êtes maintenant une grande demoiselle, une femme, qu’il faut laisser reposer sur ce beau lit blanc !

Et il allait reposer Violette sur le lit, et elle lui murmurait :

— Père, comme tu me fais heureuse !

— Heureuse, ma Violette ?… je l’espère bien. Mais ce n’est pas tout : il importe maintenant de compléter ce bonheur.

Aussitôt faisant signe à l’abbé de le suivre, il marcha vers Jules qui, transfiguré, buvait avec ivresse les paroles de Harold à Violette. Puis Harold et l’abbé entraînèrent le lieutenant jusqu’au lit.

Et le millionnaire disait :

— Viens mon fils viens près de celle qui t’appelle !

Là, il prenait l’unique main de Jules qu’il plaçait dans les deux mains de Violette, disant :

— Soyez heureux toujours !

Puis, il ajouta en frappant légèrement sur l’épaule du jeune homme :

— Ah ! lieutenant, votre revanche a porté de beaux coups ; et, dès ce jour, je vous le jure la race française du Canada n’aura jamais de plus ardent défenseur que celui qui vous parle !

Alors Violette saisit son père par le cou, l’attira gentiment et couvrit ses lèvres de baisers humides.