Page:Féron - La revanche d'une race, paru dans L'Étoile du Nord, 1927-1928.djvu/282

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Il fallait t’apprendre ce fait pour mieux te préparer à une très grosse épreuve.

— Monsieur l’abbé, répondit le lieutenant d’une voix angoissée, quant à moi, je suis prêt à tout, à toutes les épreuves, à toutes les catastrophes. Mais c’est à Violette qu’il faut penser ! C’est d’elle qu’il faut éloigner l’épreuve et la souffrance. Ah ! comme tout à l’heure elle était heureuse ! Je le sentais, je la voyais… Et maintenant faudra-t-il que ce bonheur à peine né s’éclipse à l’approche d’un sombre nuage ? Est-ce que déjà les beaux rêves ébauchés vont s’éparpiller et s’évanouir sous le vent d’orage ? Ah ! cruauté du sort !… gémit le malheureux tandis que ses traits se crispaient douloureusement.

— Jules, dit l’abbé avec un accent de doux reproche, je te pensais plus courageux.

— Eh ! monsieur l’abbé, ne le suis-je pas assez ? répliqua le lieutenant avec un sourire amer. Mais ne comprenez-vous pas que c’est Violette qui souffrira… si déjà à cette heure elle ne verse des torrents de larmes !… Le sait-elle que son père a été arrêté ?

— Je pense qu’elle sait tout en ce moment, parce que le chirurgien a dû le lui apprendre, comme il en était chargé. Mais je suis tranquille : je connais trop sa vaillance pour m’inquiéter à son sujet. Violette, j’en suis certain, saura surmonter cette épreuve avec tout l’héroïsme de son amour pour toi.

— Mais enfin, quelle est donc cette grosse épreuve dont vous me parliez tantôt ? demanda Jules très inquiet.

L’abbé n’eut pas le temps de répondre, on venait de frapper à la porte.

Il alla ouvrir. Puis, reconnaissant les personnes qui entraient, il revint aussitôt près de Jules à qui il murmura d’une voix très tendre.

— Mon fils, voici l’épreuve ! Sois fort et courageux ! Songe à elle car elle est là aussi ! Oui, songe à elle, puisque c’est elle qui t’a sauvé !

Alors, Jules se raidit, reprit son calme et serra énergiquement la main que l’abbé abandonnait.

Sept personnages venaient de pénétrer dans la chambre.

C’était d’abord le chirurgien en chef suivi d’un juge d’instruction.

Puis venait monsieur Durieux, l’agent de police, accompagné d’un autre agent. Entre ces deux hommes de police marchait Harold Spalding, tremblant, défait, pitoyable.

En dernier lieu venaient Pascal et Violette. La jeune fille avait insisté pour être admise à la confrontation.

Le chirurgien et le juge d’instruction s’étaient approchés jusqu’au chevet du blessé.