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ble vouloir combattre à nos côtés, et pour notre cause, il est bon de la prévenir.

L’abbé fut interrompu par le chirurgien-major, qui venait de rentrer à l’hôpital.

La figure du chirurgien — un anglo-canadien qui s’était épris d’une vive sympathie pour Jules et Violette depuis qu’il connaissait leurs infortunes — exprimait tous les indices d’une profonde stupéfaction.

Il regarda l’abbé et Jules tour à tour comme pour demander s’il ne s’agissait pas de quelque mauvaise plaisanterie.

C’est à Jules qu’il adressa la parole.

— Savez-vous que je viens d’apprendre une nouvelle extraordinaire ?

— Que je suis arrêté comme affilié à une bande d’espions allemands… répondit Jules en souriant.

— Et que je suis responsable de votre personne… Je me demande si ce n’est pas là une comédie dont on veut me faire le bouffon ?

— Il n’est que trop vrai, affirma l’abbé, que notre ami a été accusé d’espionnage et mis en état d’arrestation.

— Mais l’accusation est fausse assurément ? s’écria le chirurgien avec indignation.

— Oui… et nous le prouverons bientôt, dit l’abbé sur un ton résolu.

— Ah ! je le souhaite ardemment pour notre blessé, répliqua avec une grande sincérité le chirurgien-major.

— Merci, monsieur, répondit Jules avec reconnaissance.

Les trois hommes causèrent quelques minutes encore, puis le chirurgien, après avoir serré la main de l’abbé et celle de Jules, se retira.

Alors l’abbé se dirigea vers Violette qu’il attira à l’écart.

— Avez-vous une minute de loisirs ? demanda-t-il.

— Oui, répondit Violette.

— En ce cas prêtez-moi une oreille attentive, car j’ai à vous donner les explications que j’ai données à Jules tout à l’heure.

— Je vous écoute, monsieur l’abbé.

— Mademoiselle, commença l’abbé, j’ai à vous apprendre une nouvelle très grave, d’abord, — une nouvelle qui va vous causer une très grande douleur. Je vous demande pardon à l’avance. J’aurais pu me taire… mais je vous sais trop partisan de notre cause pour vous cacher la vérité.

— Monsieur l’abbé, répondit Violette d’une voix calme, depuis longtemps je suis prête à toutes les douleurs. Mon cœur a déjà saigné par tous ses pores, il ne peut saigner davantage. Parlez donc sans crainte.